Un peu de vision et beaucoup de cohérence: la recette d'une entreprise visionnaire

Elaborer une entreprise visionnaire demande 1 % de vision, et 99 % de cohérence. Combien de sociétés avez-vous fréquenté qui, fièrement, placardent sur ses murs des valeurs, développent de beaux discours, écrivent de merveilleux fascicules qui recensent l’idéologie de l’entreprise ? Et combien de ces mêmes entreprises étaient congruentes par rapport aux messages qu’elles distillaient dans l’esprit de ses employés ? Pléthore d’organisations construisent - plic ploc - une vision, au lieu de la faire émerger,  au lieu de la faire vivre par ses salariés. Une vision désincarnée, non participative. Parce qu'ils pensaient unir ses collaborateurs, ils affichaient de beaux principes: un jeu de dupe contre productif, de belles signatures de polichinelle censées attirer les prospects et les talents: "De l'engagement plus que de l'obéissance. Venez travailler chez nous - et avec nous - pour changer le monde, pour vous épanouir, pour pleinement exprimer votre potentiel, votre créativité, etc." Au fond, qu'elle est la définition de ce concept si souvent malmené: la vision d’entreprise ?

Dans leur article Construire votre vision d’entreprise”, Harvard Business Review 1996, James C. Collins et Jerry I. Porras, développent un cadre normatif afin de faire émerger une vision en entreprise. Selon les auteurs, elle repose sur deux axes: l’idéologie fondamentale, et la projection dans l’avenir. 

James Collins / Jerry Porras, "Vision en entreprise"

Un guide, une source d’inspiration. L’idéologie fondamentale peut se résumer par: "il est plus important de savoir qui l’on est que de savoir où l’on va, car la destination changera au rythme des évolutions du monde qui nous entoure. Les dirigeants meurent, les produits deviennent obsolètes, les marchés se transforment, de nouvelles technologies apparaissent, les tendances managériales vont et viennent (...) mais l'idéologie fondamentale (...) cette identité constante (...) persiste." Elle repose sur deux composantes: les valeurs fondamentales et l’objectif fondamental.

Les valeurs fondamentales, ces intemporels et inexplicables principes directeurs. "Les valeurs fondamentales énoncées dans notre credo sont peut-être des avantages concurrentiels, mais ce n’est pas pour cela que nous les avons choisies. C’est parce qu’elles incarnent ce que nous défendons, et nous nous y tiendrons même si elles devenaient un désavantage concurrentiel dans certaines situations," Ralph S. Larson, PDG de Johnson & Johnson. 
  • Questions pour les faire émerger: Quelles sont les valeurs fondamentales que vous portez à titre personnel dans votre travail ? Celles-ci comptent-elles tellement pour vous que vous vous y tiendrez qu'elles soient ou non récompensées ? Si vous vous réveilliez demain matin avec suffisamment d'argent pour partir à la retraite sur-le-champ, continueriez-vous à honorer ces valeurs ? Pouvez-vous les imaginer aussi pertinentes pour vous dans un siècle qu'aujourd'hui ? Envisagez-vous de conserver ces valeurs fondamentales, même si une ou plusieurs d'ente elles devenaient un désavantage concurrentiel ? Si vous vous apprêtiez à créer une nouvelle organisation demain, dans une tout autre branche, quelles valeurs fondamentales lui insuffleriez-vous indépendamment du secteur d'activité ? 

Le but fondamental. "Il est comme une étoile qui vous guide à l’horizon: toujours poursuivi, jamais atteint (...) Le fait même que le but ne puisse pas être atteint implique que l’organisation ne doit jamais cesser de stimuler le changement et le progrès," expliquent James C. Collins et Jerry I. Porras.
  • Questions pour le faire émerger: A bon prix, un acheteur propose d'acquérir votre entreprise. Sauf que vous savez pertinemment que, une fois acquise, il la fermera, tout en reclassant tous vos collaborateurs. Accepteriez-vous cette offre ? Pourquoi ? Qu'est-ce qui serait perdu si l'entreprise mettait la clé sous la porte ? En quoi est-il important que l'entreprise continue d'exister ? 

La projection dans l’avenir: "Il s'agit de créer un avenir, et non de le prédire.Cette projection se compose d’un grand et audacieux objectif étalé sur 10 à 30 ans - et qui permet de concentrer les efforts de chacun dans une seule et unique direction, qui sert de catalyseur à l'esprit d'équipe - et d’une description vivante qui l'anime. 
  • Questions pour faire émerger cette projection dans l'avenir: Nous donne-t-elle de l'énergie ? Est-elle stimulante ? Déclenche-telle un élan ? Séduit-elle les collaborateurs ? Quel est le degré de confiance et d'engagement qu'elle inspire ?

"Ne faites pas de trop petits rêves, car ils n'ont pas le pouvoir de faire avancer les Hommes," préconisait Goethe. "Dans 20 ans, vous serez plus déçu par les choses que vous n’avez pas faîtes que par celles que vous avez faites. Alors sortez des sentiers battus. Mettez les voiles. Explorez. Rêvez. Découvrez,” recommandait Mark Twain, avant de rajouter: "Ils ne savaient pas que c'était impossible alors ils l'ont fait." Avancez pas à pas, et osez, et ayez confiance en vous, et envers autrui, partager vos idées, vos ressentis, et rappelez-vous: une solution imparfaite qui existe est de loin bien préférable à une solution parfaite qui n'existera jamais...

Principale source de ce billet de blog, et à lire, donc: "Building Your Company’s Vision", par Jim Collins et Jerry I. Porras, Harvard Business Review

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